Il suffit d'observer à partir d'un avion, ou tout simplement depuis
les hauteurs de l'arrière-pays, la Baie des Anges en période de crue du Var et du Paillon, pour s'apercevoir que les eaux turbides de ces rivières, diversement colorées, s'étendent très au large. Il s'agit là essentiellement de sédiments fins en suspension, argileux ou micacés. Mais qu'en est-il des fractions d'alluvions invisibles à l'oeil, celles qui sont les plus grossières et qui se déposent au fond de la mer?
Jusqu'où s'étendent-elles ?
Un premier élément de réponse a été apporté, il y a déjà quelques décennies déjà, par les carottages réalisés sur la pente continentale et même dans la plaine abyssale ligure, qui ont montré la présence de sables et même de galets du Var et du Paillon,
jusqu'à des profondeurs de plus de 2000 mètres. Ces produits, initialement déposés dans le delta et le prodelta du Var,
au voisinage de son embouchure, ont été transportés jusqu'à ces profondeurs par des avalanches et des courants de turbidité se propageant sur le fond marin.
Des études récentes réalisées au moyen de sondeurs acoustiques très perfectionnés et de méthodes sismiques à haute résolution ont laissé entrevoir que les sédiments grossiers du Var et du Paillon se retrouvaient, au sein d'accumulations de type deltaïque, jusqu'au large de la Corse.
Une vérification directe de ces hypothèses vient d'être apportée par l'étude minéralogique des zircons
contenus dans les sables de ces accumulations pseudo-deltaïques.
Le zircon est connu pour être un minéral très résistant, peu altérable par les agents physico-chimiques.
Il constitue donc un traceur idéal de l'origine des sédiments, lorsque
ceux-ci sont dérivés de roches-mères contenant des zircons.
Sa morphologie permet d'identifier les massifs cristallins à partir
desquels ils dérivent.
Les analyses réalisées démontrent sans aucune ambiguïté que les sédiments superficiels recueillis au
large des côtes de Corse occidentale, jusqu'à la latitude de Galéria, proviennent bien de la Provence et particulièrement des roches du Mercantour. Après avoir transité par le Var et le Paillon, ils ont été canalisés par leurs canyons sous-marins, et se sont étalés au large de la Corse.
Tout se passe comme si de nos jours la Provence tenait à se rappeler
aux bons souvenir de la Corse,
dont elle avait été séparée, il y a 25 millions d'années, par les exigences des mouvements géodynamiques.
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